Tractatus logico-philosophicus (français): Difference between revisions

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'''3.2''' Dans la proposition la pensée peut être exprimée de telle façon que les objets de la pensée correspondent aux éléments du signe propositionnel.
'''3.2''' Dans la proposition la pensée peut être exprimée de telle façon que les objets de la pensée correspondent aux éléments du signe propositionnel.


'''3.201''' Je nomme ces éléments : « signes simples » et cette proposition: « complètement analysée ».
'''3.201''' Je nomme ces éléments : « signes simples » et cette proposition : « complètement analysée ».


'''3.202''' Les signes simples utilisés dans la proposition s'appellent noms.
'''3.202''' Les signes simples utilisés dans la proposition s'appellent noms.


'''3.203''' Le nom signifie<ref>''bedeutet''. On distinguera la traduction de ce verbe de celles de: ''aufweisen'' (''montrer'' sans pouvoir ''exprimer'', 2.172 par exemple), et de : ''bezeichnen'' (indiquer, dénoter, mot général et assez vague s'appliquant aussi bien au signe propositionnel qu'au nom). On traduira ''Bedeutung'' par : ''signification''.</ref> l'objet. L'objet est sa signification. (« A » est le même signe que « A ».)
'''3.203''' Le nom signifie<ref>''bedeutet''. On distinguera la traduction de ce verbe de celles de : ''aufweisen'' (''montrer'' sans pouvoir ''exprimer'', 2.172 par exemple), et de : ''bezeichnen'' (indiquer, dénoter, mot général et assez vague s'appliquant aussi bien au signe propositionnel qu'au nom). On traduira ''Bedeutung'' par : ''signification''.</ref> l'objet. L'objet est sa signification. (« A » est le même signe que « A ».)


'''3.21''' À la configuration des signes simples dans le signe propositionnel correspond la configuration des objets dans la situation.
'''3.21''' À la configuration des signes simples dans le signe propositionnel correspond la configuration des objets dans la situation.
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Supposons, par exemple, que la fonction F(fx) puisse être son propre argument; il y aurait donc alors une proposition « F(F(fx)) », dans laquelle la fonction externe F et la fonction interne F devraient avoir des significations différentes, car la fonction interne est de la forme φ(fx), l'externe ψ(φ(fx)). Seule est commune aux deux fonctions la lettre F, mais qui en elle-même ne dénote rien.
Supposons, par exemple, que la fonction F(fx) puisse être son propre argument; il y aurait donc alors une proposition « F(F(fx)) », dans laquelle la fonction externe F et la fonction interne F devraient avoir des significations différentes, car la fonction interne est de la forme φ(fx), l'externe ψ(φ(fx)). Seule est commune aux deux fonctions la lettre F, mais qui en elle-même ne dénote rien.


Ceci s'éclaire immédiatement si, au lieu de « F(F(u)) », nous écrivons: « (∃φ) : F(φu) . φu = Fu ».
Ceci s'éclaire immédiatement si, au lieu de « F(F(u)) », nous écrivons : « (∃φ) : F(φu) . φu = Fu ».


Ainsi se trouve éliminé le paradoxe de Russell.
Ainsi se trouve éliminé le paradoxe de Russell.
Line 454: Line 454:
Et de même, plus généralement, est essentiel au symbole ce qui est commun à tous les symboles qui peuvent atteindre le même but.
Et de même, plus généralement, est essentiel au symbole ce qui est commun à tous les symboles qui peuvent atteindre le même but.


'''3.3411''' On pourrait donc dire: le véritable nom est ce que tous les symboles qui dénotent l'objet ont en commun. Il s'ensuivrait, de proche en proche, qu'aucune composition n'est essentielle au nom.
'''3.3411''' On pourrait donc dire : le véritable nom est ce que tous les symboles qui dénotent l'objet ont en commun. Il s'ensuivrait, de proche en proche, qu'aucune composition n'est essentielle au nom.


'''3.342''' Dans nos notations, il y a bien quelque chose d'arbitraire; mais ce qui n'est pas arbitraire, c'est que, lorsque quelque chose a été arbitrairement déterminé, alors quelque chose d'autre doit avoir lieu. (Ceci résulte de l'''essence'' de la notation.)
'''3.342''' Dans nos notations, il y a bien quelque chose d'arbitraire; mais ce qui n'est pas arbitraire, c'est que, lorsque quelque chose a été arbitrairement déterminé, alors quelque chose d'autre doit avoir lieu. (Ceci résulte de l'''essence'' de la notation.)
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'''4.003''' La plupart des propositions et des questions qui ont été écrites touchant les matières philosophiques ne sont pas fausses, mais sont dépourvues de sens. Nous ne pouvons donc en aucune façon répondre à de telles questions, mais seulement établir leur non-sens. La plupart des propositions et questions des philosophes découlent de notre incompréhension de la logique de la langue.
'''4.003''' La plupart des propositions et des questions qui ont été écrites touchant les matières philosophiques ne sont pas fausses, mais sont dépourvues de sens. Nous ne pouvons donc en aucune façon répondre à de telles questions, mais seulement établir leur non-sens. La plupart des propositions et questions des philosophes découlent de notre incompréhension de la logique de la langue.


(Elles sont du même type que la question: le Bien est-il plus ou moins identique que le Beau?)
(Elles sont du même type que la question : le Bien est-il plus ou moins identique que le Beau?)


Et ce n'est pas merveille si les problèmes les plus profonds ne sont, à proprement parler, ''pas'' des problèmes.
Et ce n'est pas merveille si les problèmes les plus profonds ne sont, à proprement parler, ''pas'' des problèmes.


'''4.0031''' Toute philosophie est « critique du langage ». (Mais certainement pas au sens de Mauthner<ref>Auteur de ''Contributions à une critique du langage'' (1903). Son influence sur Wittgenstein apparaît néanmoins clairement dans cette citation: « Sitôt que nous avons vraiment quelque chose à dire, il faut nous taire » (''Contributions I'', p. 111), à rapprocher de l'aphorisme 7 du ''Tractatus''.</ref>.) Le mérite de Russell est d'avoir montré que la forme logique apparente de la proposition n'est pas nécessairement sa forme logique réelle.
'''4.0031''' Toute philosophie est « critique du langage ». (Mais certainement pas au sens de Mauthner<ref>Auteur de ''Contributions à une critique du langage'' (1903). Son influence sur Wittgenstein apparaît néanmoins clairement dans cette citation : « Sitôt que nous avons vraiment quelque chose à dire, il faut nous taire » (''Contributions I'', p. 111), à rapprocher de l'aphorisme 7 du ''Tractatus''.</ref>.) Le mérite de Russell est d'avoir montré que la forme logique apparente de la proposition n'est pas nécessairement sa forme logique réelle.


'''4.01''' La proposition est une image de la réalité.
'''4.01''' La proposition est une image de la réalité.
Line 574: Line 574:
On peut directement dire, au lieu de cette proposition a tel ou tel sens, cette proposition figure telle ou telle situation.
On peut directement dire, au lieu de cette proposition a tel ou tel sens, cette proposition figure telle ou telle situation.


'''4.0311''' Un nom est mis pour une chose, un autre pour une autre, et ils sont reliés entre eux, de telle sorte que le tout, comme un ''tableau vivant''<ref>''lebendes Bild''. Nous empruntons à la traduction anglaise de D.F. Pears et B.F. McGuiness le mot français: « tableau vivant ».</ref>, figure un état de choses.
'''4.0311''' Un nom est mis pour une chose, un autre pour une autre, et ils sont reliés entre eux, de telle sorte que le tout, comme un ''tableau vivant''<ref>''lebendes Bild''. Nous empruntons à la traduction anglaise de D.F. Pears et B.F. McGuiness le mot français : « tableau vivant ».</ref>, figure un état de choses.


'''4.0312''' La possibilité de la proposition repose sur le principe de la position de signes comme représentants des objets. Ma pensée fondamentale est que les « constantes logiques ne sont les représentants de rien. Que la ''logique'' des faits ne peut elle-même avoir de représentant.
'''4.0312''' La possibilité de la proposition repose sur le principe de la position de signes comme représentants des objets. Ma pensée fondamentale est que les « constantes logiques ne sont les représentants de rien. Que la ''logique'' des faits ne peut elle-même avoir de représentant.
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'''4.0411''' Si nous voulions, par exemple, exprimer au moyen d'un indice préfixé, tel que « Gén.fx », ce que l'on exprime par « (x)fx », cela ne serait pas suffisant, car nous ne saurions pas ce qui est généralisé. Si nous voulions l'exprimer par un indice suffixé « α », tel que : « f(x<sub>α</sub>) », ce ne serait pas non plus suffisant, car nous ne saurions pas quelle est la portée de la notation de généralisation.
'''4.0411''' Si nous voulions, par exemple, exprimer au moyen d'un indice préfixé, tel que « Gén.fx », ce que l'on exprime par « (x)fx », cela ne serait pas suffisant, car nous ne saurions pas ce qui est généralisé. Si nous voulions l'exprimer par un indice suffixé « α », tel que : « f(x<sub>α</sub>) », ce ne serait pas non plus suffisant, car nous ne saurions pas quelle est la portée de la notation de généralisation.


Si nous voulions essayer de l'exprimer en introduisant une marque aux places des arguments, comme par exemple: « (G,G) . F(G,G) », cela ne suffirait pas, car nous ne pourrions fixer l'identité des variables. Etc.
Si nous voulions essayer de l'exprimer en introduisant une marque aux places des arguments, comme par exemple : « (G,G) . F(G,G) », cela ne suffirait pas, car nous ne pourrions fixer l'identité des variables. Etc.


Tous ces modes de dénotation sont insuffisants, en ce qu'ils ne possèdent pas le degré nécessaire de multiplicité mathématique.
Tous ces modes de dénotation sont insuffisants, en ce qu'ils ne possèdent pas le degré nécessaire de multiplicité mathématique.
Line 614: Line 614:
Les propositions « p» et «~p» ont un sens opposé, mais il leur correspond une seule et même réalité.
Les propositions « p» et «~p» ont un sens opposé, mais il leur correspond une seule et même réalité.


'''4.063''' Une image pour expliquer le concept de vérité: une tache noire sur un papier blanc; la forme de la tache peut être décrite en disant pour chaque point de la feuille s'il est blanc ou noir. Le fait qu'un point soit noir correspond à un fait positif – le fait qu'un point soit blanc (non noir) à un fait négatif. Si j'indique un point de la surface (une valeur de vérité frégéenne), ceci correspond à une hypothèse proposée à un jugement, etc., etc.
'''4.063''' Une image pour expliquer le concept de vérité : une tache noire sur un papier blanc; la forme de la tache peut être décrite en disant pour chaque point de la feuille s'il est blanc ou noir. Le fait qu'un point soit noir correspond à un fait positif – le fait qu'un point soit blanc (non noir) à un fait négatif. Si j'indique un point de la surface (une valeur de vérité frégéenne), ceci correspond à une hypothèse proposée à un jugement, etc., etc.


Mais pour pouvoir dire qu'un point est noir ou blanc, il me faut tout d'abord savoir quand un point sera dit blanc et quand il sera dit noir; pour pouvoir dire « p » est vrai (ou faux), il me faut avoir déterminé en quelles circonstances j'appelle « p » vraie, et par là je détermine le sens de la proposition.
Mais pour pouvoir dire qu'un point est noir ou blanc, il me faut tout d'abord savoir quand un point sera dit blanc et quand il sera dit noir; pour pouvoir dire « p » est vrai (ou faux), il me faut avoir déterminé en quelles circonstances j'appelle « p » vraie, et par là je détermine le sens de la proposition.
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'''4.116''' Tout ce qui peut proprement être pensé peut être exprimé. Tout ce qui se laisse exprimer se laisse exprimer clairement.
'''4.116''' Tout ce qui peut proprement être pensé peut être exprimé. Tout ce qui se laisse exprimer se laisse exprimer clairement.


'''4.12''' La proposition peut figurer la totalité de la réalité, mais elle ne peut figurer ce qu'elle doit avoir de commun avec la réalité pour pouvoir figurer celle-ci: la forme logique.
'''4.12''' La proposition peut figurer la totalité de la réalité, mais elle ne peut figurer ce qu'elle doit avoir de commun avec la réalité pour pouvoir figurer celle-ci : la forme logique.


Pour pouvoir figurer la forme logique, il faudrait que nous puissions, avec la proposition, nous placer en dehors de la logique, c'est-à-dire en dehors du monde.
Pour pouvoir figurer la forme logique, il faudrait que nous puissions, avec la proposition, nous placer en dehors de la logique, c'est-à-dire en dehors du monde.
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Chaque fois qu'il en est autrement, qu'il est donc utilisé comme nom de concept propre, naissent des pseudo-propositions dépourvues de sens.
Chaque fois qu'il en est autrement, qu'il est donc utilisé comme nom de concept propre, naissent des pseudo-propositions dépourvues de sens.


Ainsi ne peut-on dire : « Il y a des objets », comme on dit par exemple: « Il y a des livres. » Et encore moins : « Il y a 100 objets »; ou : « Il y a ℵ<sub>0</sub> objets. »
Ainsi ne peut-on dire : « Il y a des objets », comme on dit par exemple : « Il y a des livres. » Et encore moins : « Il y a 100 objets »; ou : « Il y a ℵ<sub>0</sub> objets. »


Et il est dépourvu de sens de parler du ''nombre de tous les objets''.
Et il est dépourvu de sens de parler du ''nombre de tous les objets''.
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Des expressions comme : « 1 est un nombre », « Il n'y a qu'un seul zéro », et toutes celles du même genre sont dépourvues de sens.
Des expressions comme : « 1 est un nombre », « Il n'y a qu'un seul zéro », et toutes celles du même genre sont dépourvues de sens.


(Il est tout aussi dépourvu de sens de dire : « Il n'y a qu'un seul 1 » qu'il serait dépourvu de sens de dire: « 2 + 2 est, à 3 heures, égal à 4. »)
(Il est tout aussi dépourvu de sens de dire : « Il n'y a qu'un seul 1 » qu'il serait dépourvu de sens de dire : « 2 + 2 est, à 3 heures, égal à 4. »)


'''4.12721''' Le concept formel est immédiatement donné avec un objet qui tombe sous lui. On ne peut donc à la fois introduire comme concepts fondamentaux les objets d'un concept formel ''et'' le concept formel lui-même. On ne peut donc, par exemple, introduire comme concepts fondamentaux à la fois le concept de fonction et des fonctions particulières (comme fait Russell); ou le concept de nombre et des nombres déterminés.
'''4.12721''' Le concept formel est immédiatement donné avec un objet qui tombe sous lui. On ne peut donc à la fois introduire comme concepts fondamentaux les objets d'un concept formel ''et'' le concept formel lui-même. On ne peut donc, par exemple, introduire comme concepts fondamentaux à la fois le concept de fonction et des fonctions particulières (comme fait Russell); ou le concept de nombre et des nombres déterminés.


'''4.1273''' Si nous voulons exprimer dans l'idéographie la proposition générale: « b est un successeur de a », nous avons alors besoin d'une expression pour le terme général de la série de formes :
'''4.1273''' Si nous voulons exprimer dans l'idéographie la proposition générale : « b est un successeur de a », nous avons alors besoin d'une expression pour le terme général de la série de formes :


:aRb,
:aRb,
Line 784: Line 784:
'''4.1274''' La question de l'existence<ref>''Existenz''.</ref> d'un concept formel est dépourvue de sens car aucune proposition ne peut répondre à une telle question.
'''4.1274''' La question de l'existence<ref>''Existenz''.</ref> d'un concept formel est dépourvue de sens car aucune proposition ne peut répondre à une telle question.


(On ne peut donc demander, par exemple: « Y a-t-il des propositions de la forme sujet-prédicat qui soient non analysables? »)
(On ne peut donc demander, par exemple : « Y a-t-il des propositions de la forme sujet-prédicat qui soient non analysables? »)


'''4.128''' Les formes logiques n'''ont pas de nombre''.
'''4.128''' Les formes logiques n'''ont pas de nombre''.
Line 808: Line 808:
'''4.24''' Les noms sont les symboles simples, je les indique par des lettres simples (« x », « y », « z »).
'''4.24''' Les noms sont les symboles simples, je les indique par des lettres simples (« x », « y », « z »).


J'écris la proposition élémentaire comme fonction de noms, sous la forme: « fx », « φ(x,y) », etc.
J'écris la proposition élémentaire comme fonction de noms, sous la forme : « fx », « φ(x,y) », etc.


Ou bien je l'indique au moyen des lettres p, q, r.
Ou bien je l'indique au moyen des lettres p, q, r.
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« a = b » veut donc dire : le signe « a » peut être remplacé par le signe « b ».
« a = b » veut donc dire : le signe « a » peut être remplacé par le signe « b ».


(Si j'introduis par le moyen d'une équation un nouveau signe « b », en déterminant qu'il doit remplacer un signe « a » déjà connu, j'écris alors l'égalité – une définition – (comme Russell) sous la forme: « a = b Déf. ». La définition est une règle concernant les signes.)
(Si j'introduis par le moyen d'une équation un nouveau signe « b », en déterminant qu'il doit remplacer un signe « a » déjà connu, j'écris alors l'égalité – une définition – (comme Russell) sous la forme : « a = b Déf. ». La définition est une règle concernant les signes.)


'''4.242''' Les expressions de la forme « a = b » ne sont donc que des auxiliaires de la figuration; elles ne disent rien quant aux significations des signes « a », « b ».
'''4.242''' Les expressions de la forme « a = b » ne sont donc que des auxiliaires de la figuration; elles ne disent rien quant aux significations des signes « a », « b ».
Line 832: Line 832:
'''4.27''' Concernant la subsistance et la non-subsistance de n états de choses, il y a :
'''4.27''' Concernant la subsistance et la non-subsistance de n états de choses, il y a :


<math>K_n = \sum_{\nu=0}^n \binom{n}{\nu}</math> possibilités<ref>Wittgenstein note par le symbole <math>\binom{n}{\nu}</math> le nombre des combinaisons de n objets ν à ν, soit:<br />
<math>K_n = \sum_{\nu=0}^n \binom{n}{\nu}</math> possibilités<ref>Wittgenstein note par le symbole <math>\binom{n}{\nu}</math> le nombre des combinaisons de n objets ν à ν, soit :<br />
<math>\frac{n!}{\nu! (n - \nu)!}</math><br />
<math>\frac{n!}{\nu! (n - \nu)!}</math><br />
Il y a en tout : <math>\sum_{\nu=0}^n \binom{n}{\nu} = 2^n = K_n</math> situations possibles.<br />
Il y a en tout : <math>\sum_{\nu=0}^n \binom{n}{\nu} = 2^n = K_n</math> situations possibles.<br />
Line 843: Line 843:
'''4.3''' Les possibilités de vérité des propositions élémentaires signifient les possibilités de subsistance ou de non-subsistance des états de choses.
'''4.3''' Les possibilités de vérité des propositions élémentaires signifient les possibilités de subsistance ou de non-subsistance des états de choses.


'''4.31''' On peut figurer les possibilités de vérité au moyen de schémas du type suivant (« V » signifie « vrai », « F » signifie « faux »; les lignes de « V » et de « F » sous la ligne de propositions élémentaires signifient, selon un symbolisme facile à comprendre, leurs possibilités de vérité):
'''4.31''' On peut figurer les possibilités de vérité au moyen de schémas du type suivant (« V » signifie « vrai », « F » signifie « faux »; les lignes de « V » et de « F » sous la ligne de propositions élémentaires signifient, selon un symbolisme facile à comprendre, leurs possibilités de vérité) :


{{TLP 4.31 fr}}
{{TLP 4.31 fr}}
Line 935: Line 935:
Qu'il y ait une forme générale de la proposition, ceci le prouve qu'il ne peut y avoir aucune proposition dont on n'aurait pu prévoir la forme (c'est-à-dire la construire). La forme générale de la proposition est : ce qui a lieu est ainsi et ainsi.
Qu'il y ait une forme générale de la proposition, ceci le prouve qu'il ne peut y avoir aucune proposition dont on n'aurait pu prévoir la forme (c'est-à-dire la construire). La forme générale de la proposition est : ce qui a lieu est ainsi et ainsi.


'''4.51''' À supposer que ''toutes'' les propositions élémentaires me soient données, on peut alors simplement demander: quelles propositions puis-je former à partir d'elles? Et la réponse est : ''toutes'' les propositions, ainsi se trouvent-elles délimitées.
'''4.51''' À supposer que ''toutes'' les propositions élémentaires me soient données, on peut alors simplement demander : quelles propositions puis-je former à partir d'elles? Et la réponse est : ''toutes'' les propositions, ainsi se trouvent-elles délimitées.


'''4.52''' Les propositions sont ''tout'' ce qui découle de l'ensemble des propositions élémentaires (naturellement aussi de ce que cet ensemble en est la ''totalité''). (Ainsi pourrait-on dire, en un certain sens, que ''toutes'' les propositions sont des généralisations des propositions élémentaires.)
'''4.52''' Les propositions sont ''tout'' ce qui découle de l'ensemble des propositions élémentaires (naturellement aussi de ce que cet ensemble en est la ''totalité''). (Ainsi pourrait-on dire, en un certain sens, que ''toutes'' les propositions sont des généralisations des propositions élémentaires.)
Line 1,029: Line 1,029:
La contradiction est la frontière externe des propositions, la tautologie est leur centre sans substance.
La contradiction est la frontière externe des propositions, la tautologie est leur centre sans substance.


'''5.15''' Si V<sub>r</sub> est le nombre des fondements de vérité de la proposition « r », V<sub>rs</sub> le nombre des fondements de vérité de la proposition « s » qui sont en même temps fondements de vérité de « r », nous nommons alors le rapport V<sub>rs</sub>: V, ''mesure de la probabilité'' que la proposition « r » confère à la proposition « s ».
'''5.15''' Si V<sub>r</sub> est le nombre des fondements de vérité de la proposition « r », V<sub>rs</sub> le nombre des fondements de vérité de la proposition « s » qui sont en même temps fondements de vérité de « r », nous nommons alors le rapport V<sub>rs</sub> : V, ''mesure de la probabilité'' que la proposition « r » confère à la proposition « s ».


'''5.151''' Dans un schéma comme celui de [[Private:Tractatus logico-philosophicus (français)#5.101|5.101]], soit V<sub>r</sub> le nombre des « V » de la proposition r; V<sub>rs</sub> le nombre des « V » de la proposition s qui correspondent, dans une même colonne à des « V » de la proposition r. La proposition r confère alors à la proposition s la probabilité V<sub>rs</sub> : V<sub>r</sub>.
'''5.151''' Dans un schéma comme celui de [[Private:Tractatus logico-philosophicus (français)#5.101|5.101]], soit V<sub>r</sub> le nombre des « V » de la proposition r; V<sub>rs</sub> le nombre des « V » de la proposition s qui correspondent, dans une même colonne à des « V » de la proposition r. La proposition r confère alors à la proposition s la probabilité V<sub>rs</sub> : V<sub>r</sub>.
Line 1,127: Line 1,127:
Chaque proposition est le résultat d'opérations de vérité sur des propositions élémentaires.
Chaque proposition est le résultat d'opérations de vérité sur des propositions élémentaires.


'''5.31''' Les schémas de [[Private:Tractatus logico-philosophicus (français)#4.31|4.31]] ont encore une signification quand « p », « q », « r », etc., ne sont pas des propositions élémentaires. Et il est aisé de voir que le signe propositionnel de [[Private:Tractatus logico-philosophicus (français)#4.442|4.442]] exprime encore une unique fonction de vérité de propositions élémentaires, même quand « p » et « q » sont des fonctions de vérité de propositions élémentaires.
'''5.31''' Les schémas de [[#4.31|4.31]] ont encore une signification quand « p », « q », « r », etc., ne sont pas des propositions élémentaires. Et il est aisé de voir que le signe propositionnel de [[Private:Tractatus logico-philosophicus (français)#4.442|4.442]] exprime encore une unique fonction de vérité de propositions élémentaires, même quand « p » et « q » sont des fonctions de vérité de propositions élémentaires.


'''5.32''' Toutes les fonctions de vérité sont des résultats d'applications successives d'un nombre fini d'opérations de vérité sur les propositions élémentaires.
'''5.32''' Toutes les fonctions de vérité sont des résultats d'applications successives d'un nombre fini d'opérations de vérité sur les propositions élémentaires.
Line 1,223: Line 1,223:
'''5.4732''' Nous ne pouvons donner à un signe un sens incorrect.
'''5.4732''' Nous ne pouvons donner à un signe un sens incorrect.


'''5.47321''' La devise d'Occam n'est naturellement pas une règle arbitraire, ou justifiée par son succès pratique: elle déclare que les unités ''non nécessaires'' d'un système de signes n'ont aucune signification.
'''5.47321''' La devise d'Occam n'est naturellement pas une règle arbitraire, ou justifiée par son succès pratique : elle déclare que les unités ''non nécessaires'' d'un système de signes n'ont aucune signification.


Des signes qui ont ''un'' seul et même but sont logiquement équivalents, des signes qui n'ont ''aucun'' but sont logiquement sans signification.
Des signes qui ont ''un'' seul et même but sont logiquement équivalents, des signes qui n'ont ''aucun'' but sont logiquement sans signification.
Line 1,239: Line 1,239:
'''5.476''' Il est clair qu'il n'est pas question ici d'un ''certain nombre de concepts fondamentaux'' qui doivent être dénotés, mais de l'expression d'une règle.
'''5.476''' Il est clair qu'il n'est pas question ici d'un ''certain nombre de concepts fondamentaux'' qui doivent être dénotés, mais de l'expression d'une règle.


'''5.5''' Chaque fonction de vérité est le résultat d'applications successives de l'opération: (– – – – – V) (ξ,....) à des propositions élémentaires.
'''5.5''' Chaque fonction de vérité est le résultat d'applications successives de l'opération : (– – – – – V) (ξ,....) à des propositions élémentaires.


Cette opération nie l'ensemble des propositions comprises dans les parenthèses de droite, et je la nomme négation de ces propositions.
Cette opération nie l'ensemble des propositions comprises dans les parenthèses de droite, et je la nomme négation de ces propositions.
Line 1,253: Line 1,253:
Le mode de description des membres de l'expression entre parenthèses n'est pas essentiel.
Le mode de description des membres de l'expression entre parenthèses n'est pas essentiel.


Nous pouvons distinguer trois espèces de description: 1. L'énumération directe. En ce cas, nous pouvons, au lieu de la variable, poser simplement ses valeurs constantes. 2. La donnée d'une fonction fx, dont les valeurs pour toutes les valeurs de x sont les propositions à décrire. 3. La donnée d'une loi formelle, selon laquelle ces propositions sont construites. En ce cas, les membres de l'expression entre parenthèses sont l'ensemble des membres d'une série de formes.
Nous pouvons distinguer trois espèces de description : 1. L'énumération directe. En ce cas, nous pouvons, au lieu de la variable, poser simplement ses valeurs constantes. 2. La donnée d'une fonction fx, dont les valeurs pour toutes les valeurs de x sont les propositions à décrire. 3. La donnée d'une loi formelle, selon laquelle ces propositions sont construites. En ce cas, les membres de l'expression entre parenthèses sont l'ensemble des membres d'une série de formes.


'''5.502''' J'écris donc, au lieu de « (– – – – – V) (ξ,....) », « <math>N ( \bar{\xi} )</math> ».
'''5.502''' J'écris donc, au lieu de « (– – – – – V) (ξ,....) », « <math>N ( \bar{\xi} )</math> ».
Line 1,281: Line 1,281:
Et c'est en effet le cas, car le symbole « p » et le symbole « q » présupposent d'eux-mêmes les « ∨ », « ~ », etc. Si le signe « p » dans «p ∨ q» ne tient pas lieu d'un signe complexe, il ne peut avoir de sens pris isolément; et les signes « p ∨ p », « p . p » équivalents à « p » ne peuvent non plus avoir aucun sens. Mais si « p ∨ p » n'a aucun sens, « p ∨ q » ne peut en avoir un.
Et c'est en effet le cas, car le symbole « p » et le symbole « q » présupposent d'eux-mêmes les « ∨ », « ~ », etc. Si le signe « p » dans «p ∨ q» ne tient pas lieu d'un signe complexe, il ne peut avoir de sens pris isolément; et les signes « p ∨ p », « p . p » équivalents à « p » ne peuvent non plus avoir aucun sens. Mais si « p ∨ p » n'a aucun sens, « p ∨ q » ne peut en avoir un.


'''5.5151''' Le signe de la proposition négative doit-il être construit à partir du signe de la proposition positive? Pourquoi ne devrait-on pas pouvoir exprimer la proposition négative au moyen d'un fait négatif? (Par exemple: que « a » ne soit pas dans une certaine relation avec « b » pourrait exprimer que aRb n'a pas lieu.)
'''5.5151''' Le signe de la proposition négative doit-il être construit à partir du signe de la proposition positive? Pourquoi ne devrait-on pas pouvoir exprimer la proposition négative au moyen d'un fait négatif? (Par exemple : que « a » ne soit pas dans une certaine relation avec « b » pourrait exprimer que aRb n'a pas lieu.)


Mais alors la proposition négative est encore indirectement construite au moyen de la positive.
Mais alors la proposition négative est encore indirectement construite au moyen de la positive.
Line 1,307: Line 1,307:
'''5.526''' On peut décrire complètement le monde au moyen de propositions totalement généralisées, c'est-à-dire, par conséquent, sans coordonner par avance aucun nom à un objet déterminé.
'''5.526''' On peut décrire complètement le monde au moyen de propositions totalement généralisées, c'est-à-dire, par conséquent, sans coordonner par avance aucun nom à un objet déterminé.


Pour passer alors au mode d'expression usuel il suffit, après une expression comme: « il y a un x et un seulement tel que... », d'ajouter : et cet x est a.
Pour passer alors au mode d'expression usuel il suffit, après une expression comme : « il y a un x et un seulement tel que... », d'ajouter : et cet x est a.


'''5.5261''' Une proposition totalement généralisée est, comme chaque autre proposition, composée. (Ceci apparaît en ce que nous devons, dans « (∃x,φ). φx » mentionner séparément « φ » et « x ». Tous deux sont, indépendamment l'un de l'autre, dans des relations de dénotation avec le monde, comme dans une proposition non généralisée.)
'''5.5261''' Une proposition totalement généralisée est, comme chaque autre proposition, composée. (Ceci apparaît en ce que nous devons, dans « (∃x,φ). φx » mentionner séparément « φ » et « x ». Tous deux sont, indépendamment l'un de l'autre, dans des relations de dénotation avec le monde, comme dans une proposition non généralisée.)
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Ce que doit dire l'axiome de l'infini pourrait s'exprimer dans la langue par ceci, qu'il y a une infinité de noms avec des significations différentes.
Ce que doit dire l'axiome de l'infini pourrait s'exprimer dans la langue par ceci, qu'il y a une infinité de noms avec des significations différentes.


'''5.5351''' Dans certains cas, on se trouve tenté d'utiliser des expressions de la forme : « a = a » ou « p ⊃ p » et d'autres du même genre. Ceci arrive en fait lorsque l'on voudrait parler d'une image primitive: proposition, chose, etc. Ainsi Russell dans les ''Principles of mathematics'' a rendu l'expression dépourvue de sens « p est une proposition » en symboles par : « p ⊃ p », et l'a posée comme hypothèse précédant certaines propositions, afin que leurs arguments ne puissent y être occupés que par des propositions.
'''5.5351''' Dans certains cas, on se trouve tenté d'utiliser des expressions de la forme : « a = a » ou « p ⊃ p » et d'autres du même genre. Ceci arrive en fait lorsque l'on voudrait parler d'une image primitive : proposition, chose, etc. Ainsi Russell dans les ''Principles of mathematics'' a rendu l'expression dépourvue de sens « p est une proposition » en symboles par : « p ⊃ p », et l'a posée comme hypothèse précédant certaines propositions, afin que leurs arguments ne puissent y être occupés que par des propositions.


(Il est déjà dépourvu de sens de placer l'hypothèse « p ⊃ p» devant une proposition pour lui garantir des arguments ayant la forme correcte, parce que l'hypothèse, pour un argument non propositionnel, ne devient pas fausseté, mais perd son sens, et comme la proposition elle-même est transformée en expression dépourvue de sens par l'espèce incorrecte d'arguments, elle se garde aussi bien, ou aussi mal, des arguments incorrects que l'hypothèse vide de sens qu'on lui adjoint à cet effet.)
(Il est déjà dépourvu de sens de placer l'hypothèse « p ⊃ p» devant une proposition pour lui garantir des arguments ayant la forme correcte, parce que l'hypothèse, pour un argument non propositionnel, ne devient pas fausseté, mais perd son sens, et comme la proposition elle-même est transformée en expression dépourvue de sens par l'espèce incorrecte d'arguments, elle se garde aussi bien, ou aussi mal, des arguments incorrects que l'hypothèse vide de sens qu'on lui adjoint à cet effet.)
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Et rien ''dans le champ visuel'' ne permet de conclure qu'il est vu par un œil.
Et rien ''dans le champ visuel'' ne permet de conclure qu'il est vu par un œil.


'''5.6331''' Le champ visuel n'a pas en fait une telle forme:
'''5.6331''' Le champ visuel n'a pas en fait une telle forme :


[[File:TLP 5.6331fr.png|250px|center|link=]]
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Ce qui est la forme générale du passage d'une proposition à une autre.
Ce qui est la forme générale du passage d'une proposition à une autre.


'''6.02''' Ainsi en venons-nous aux nombres: je définis
'''6.02''' Ainsi en venons-nous aux nombres : je définis


{{p center|<math>x = \Omega^{0 \prime} x \text{ Déf.}</math> et<br>
{{p center|<math>x = \Omega^{0 \prime} x \text{ Déf.}</math> et<br>
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Conformément à ces règles de signes nous écrivons donc la série <math>x, \Omega ' x, \Omega ' \Omega ' x, \Omega ' \Omega ' \Omega ' x, ...</math>
Conformément à ces règles de signes nous écrivons donc la série <math>x, \Omega ' x, \Omega ' \Omega ' x, \Omega ' \Omega ' \Omega ' x, ...</math>


de cette manière: <math>\Omega^{0 \prime} x, \Omega^{0+1 \prime} x, \Omega^{0 + 1 + 1 \prime} x, \Omega^{0 + 1 + 1 + 1 \prime} x, ...</math>
de cette manière : <math>\Omega^{0 \prime} x, \Omega^{0+1 \prime} x, \Omega^{0 + 1 + 1 \prime} x, \Omega^{0 + 1 + 1 + 1 \prime} x, ...</math>


J'écris donc, au lieu de « <math>[ x, \xi, \Omega ' \xi ]</math> » :
J'écris donc, au lieu de « <math>[ x, \xi, \Omega ' \xi ]</math> » :
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'''6.11''' Les propositions de la logique ne disent donc rien. (Ce sont les propositions analytiques.)
'''6.11''' Les propositions de la logique ne disent donc rien. (Ce sont les propositions analytiques.)


'''6.111''' Les théories qui font apparaître une proposition de la logique comme ayant un contenu sont toujours fausses. On pourrait croire, par exemple, que les mots « vrai » et « faux » désignent deux propriétés parmi d'autres, et que par conséquent ce soit un fait remarquable que chaque proposition possède l'une ou l'autre. Ce qui semble alors rien moins qu'aller de soi, pas plus que ne sonnerait comme allant de soi, par exemple, la proposition: « toutes les roses sont ou jaunes ou rouges », même si elle était vraie. Cette proposition acquiert alors tous les caractères d'une proposition des sciences de la nature, et c'est l'indice sûr qu'elle aura été conçue faussement.
'''6.111''' Les théories qui font apparaître une proposition de la logique comme ayant un contenu sont toujours fausses. On pourrait croire, par exemple, que les mots « vrai » et « faux » désignent deux propriétés parmi d'autres, et que par conséquent ce soit un fait remarquable que chaque proposition possède l'une ou l'autre. Ce qui semble alors rien moins qu'aller de soi, pas plus que ne sonnerait comme allant de soi, par exemple, la proposition : « toutes les roses sont ou jaunes ou rouges », même si elle était vraie. Cette proposition acquiert alors tous les caractères d'une proposition des sciences de la nature, et c'est l'indice sûr qu'elle aura été conçue faussement.


'''6.112''' L'explication correcte des propositions logiques doit leur conférer une position unique parmi toutes les propositions.
'''6.112''' L'explication correcte des propositions logiques doit leur conférer une position unique parmi toutes les propositions.
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'''6.1202''' Il est clair que l'on pourrait, au lieu des tautologies, employer les contradictions.
'''6.1202''' Il est clair que l'on pourrait, au lieu des tautologies, employer les contradictions.


'''6.1203''' Pour reconnaître une tautologie comme telle, on peut dans les cas où aucun signe de généralisation n'y apparaît, se servir de la méthode intuitive suivante : j'écris, au lieu de « p », « q », « r », etc., « VpF », « VqF », « VrF », etc. J'exprime les combinaisons de vérité au moyen d'accolades, par exemple:
'''6.1203''' Pour reconnaître une tautologie comme telle, on peut dans les cas où aucun signe de généralisation n'y apparaît, se servir de la méthode intuitive suivante : j'écris, au lieu de « p », « q », « r », etc., « VpF », « VqF », « VrF », etc. J'exprime les combinaisons de vérité au moyen d'accolades, par exemple :


[[File:TLP 6.1203a-it.png|300px|center|link=]]
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Que par exemple « q » suive de « p ⊃ q . p » nous le voyons sur ces deux propositions mêmes, en les liant dans « p ⊃ q . p : ⊃ : q», et montrant alors que c'est là une tautologie.
Que par exemple « q » suive de « p ⊃ q . p » nous le voyons sur ces deux propositions mêmes, en les liant dans « p ⊃ q . p : ⊃ : q», et montrant alors que c'est là une tautologie.


'''6.1222''' Cela éclaire la question: pourquoi les propositions logiques ne peuvent-elles être confirmées par l'expérience, pas plus que par l'expérience elles ne peuvent être réfutées. Non seulement une proposition de la logique ne peut être réfutée par aucune expérience possible, mais encore elle ne peut être confirmée par aucune.
'''6.1222''' Cela éclaire la question : pourquoi les propositions logiques ne peuvent-elles être confirmées par l'expérience, pas plus que par l'expérience elles ne peuvent être réfutées. Non seulement une proposition de la logique ne peut être réfutée par aucune expérience possible, mais encore elle ne peut être confirmée par aucune.


'''6.1223''' La raison sera maintenant claire pour laquelle on a souvent eu le sentiment que les « vérités logiques » doivent être de nous « exigées » : nous pouvons en effet les exiger, dans la mesure où nous pouvons exiger une notation convenable.
'''6.1223''' La raison sera maintenant claire pour laquelle on a souvent eu le sentiment que les « vérités logiques » doivent être de nous « exigées » : nous pouvons en effet les exiger, dans la mesure où nous pouvons exiger une notation convenable.
Line 1,707: Line 1,707:
'''6.34''' Toutes les propositions du genre du principe de raison suffisante, du principe de continuité de la nature, de moindre dépense dans la nature, etc., etc. sont toutes des vues a priori concernant la mise en forme possible des propositions de la science.
'''6.34''' Toutes les propositions du genre du principe de raison suffisante, du principe de continuité de la nature, de moindre dépense dans la nature, etc., etc. sont toutes des vues a priori concernant la mise en forme possible des propositions de la science.


'''6.341''' La mécanique newtonienne, par exemple, uniformise la description du monde. Figurons-nous une surface blanche, avec des taches noires irrégulières. Nous disons alors: tout ce qui ressort comme image, je puis toujours en donner une description aussi approchée que je veux, en recouvrant la surface d'un quadrillage convenablement fin et en disant de chaque carreau s'il est blanc ou noir. J'aurai ainsi uniformisé la description de la surface. Cette forme unique est arbitraire, car j'aurais pu utiliser avec le même succès un réseau à mailles triangulaires ou hexagonales. Il se peut que la description au moyen d'un réseau à mailles triangulaires soit plus simple; ce qui veut dire que nous pourrions décrire plus exactement la surface au moyen d'un réseau à mailles triangulaires plus grossier qu'avec un quadrillage plus fin (ou inversement), et ainsi de suite. Aux différents réseaux correspondent différents systèmes de description du monde. La mécanique détermine une forme de description du monde en disant : toutes les propositions de la description du monde doivent être obtenues d'une manière donnée à partir d'un certain nombre de propositions données – les axiomes de la mécanique. Ainsi la mécanique fournit-elle les pierres pour la construction de l'édifice de la science et dit : quel que soit l'édifice que tu veux élever, tu dois le construire d'une manière ou d'une autre en assemblant ces pierres et seulement elles.
'''6.341''' La mécanique newtonienne, par exemple, uniformise la description du monde. Figurons-nous une surface blanche, avec des taches noires irrégulières. Nous disons alors : tout ce qui ressort comme image, je puis toujours en donner une description aussi approchée que je veux, en recouvrant la surface d'un quadrillage convenablement fin et en disant de chaque carreau s'il est blanc ou noir. J'aurai ainsi uniformisé la description de la surface. Cette forme unique est arbitraire, car j'aurais pu utiliser avec le même succès un réseau à mailles triangulaires ou hexagonales. Il se peut que la description au moyen d'un réseau à mailles triangulaires soit plus simple; ce qui veut dire que nous pourrions décrire plus exactement la surface au moyen d'un réseau à mailles triangulaires plus grossier qu'avec un quadrillage plus fin (ou inversement), et ainsi de suite. Aux différents réseaux correspondent différents systèmes de description du monde. La mécanique détermine une forme de description du monde en disant : toutes les propositions de la description du monde doivent être obtenues d'une manière donnée à partir d'un certain nombre de propositions données – les axiomes de la mécanique. Ainsi la mécanique fournit-elle les pierres pour la construction de l'édifice de la science et dit : quel que soit l'édifice que tu veux élever, tu dois le construire d'une manière ou d'une autre en assemblant ces pierres et seulement elles.


(De même que l'on peut écrire n'importe quel nombre avec le système des nombres, de même avec le système de la mécanique on peut former n'importe quelle proposition de la physique.)
(De même que l'on peut écrire n'importe quel nombre avec le système des nombres, de même avec le système de la mécanique on peut former n'importe quelle proposition de la physique.)
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Mais à la vérité on ne peut le dire : cela se montre.
Mais à la vérité on ne peut le dire : cela se montre.


'''6.361''' Dans la terminologie de Hertz, on pourrait dire: seules des interdépendances légales sont pensables.
'''6.361''' Dans la terminologie de Hertz, on pourrait dire : seules des interdépendances légales sont pensables.


'''6.3611''' Nous ne pouvons comparer aucun processus au « cours du temps » – qui n'existe pas – mais seulement à un autre processus (par exemple à la marche du chronomètre).
'''6.3611''' Nous ne pouvons comparer aucun processus au « cours du temps » – qui n'existe pas – mais seulement à un autre processus (par exemple à la marche du chronomètre).